Deux comédiens sur scène, par ailleurs époux à la ville. Des amis de longue date, avec lesquels j'ai vécu de nombreux et merveilleux moments, et avec lesquels je partage déjà plusieurs réalisations artistiques. Mais jusqu'ici, je ne les avais jamais mis en scène. C'est une première...
Lorsqu'ils m'ont proposé de me confier cette tâche, j'ai immédiatement accepté, enthousiaste à l'idée de travailler à nouveau avec eux. Mais comme toujours, j'ai ensuite été prise d'un moment de doute. En suis-je capable ? Mettre en scène exige de maîtriser trois compétences : la direction d'acteurs, le sens de la scénographie et une certaine maîtrise des aspects techniques pour pouvoir interagir efficacement avec le régisseur. Or, je ne me sens vraiment à l'aise qu'avec la première, je suis peu aguerrie à la deuxième, et parfaitement étrangère à la troisième... Qu'à cela ne tienne, la tentation est trop forte. Et j'affectionne les défis.
C'est donc parti pour quelques dizaines d'heures de réflexion en amont de la première répétition, afin d'anticiper les déplacements, les postures, le ballet de mouvements ; de définir avec précision le jeu, le ton, le rythme, les ruptures ; de concevoir un univers musical accompagnant les très nombreux "noirs" de cette pièce constituée de scènes parfois très courtes.
La psychologie des personnages ne me pose aucun problème : c'est que je préfère. "Diriger" Philippe et Anne-Laure ne m'inquiète pas non plus : nous nous connaissons suffisamment pour savoir nous parler de façon bienveillante et constructive. Nous nous faisons confiance, et je sais qu'ils comptent sur moi pour nuancer leur jeu et les pousser à explorer tous les traits de caractère de leur personnage.
La mise en place est plus problématique. J'ai du mal à me projeter, à visualiser ce que les positions et mouvements donneront une fois sur scène, et s'ils seront vraiment en harmonie avec le texte et les intentions. J'annote le texte de multiples commentaires, en m'accordant le droit de les remettre en question lorsque nous répéterons.
Reste la lumière et le son. C'est le volet que je maîtrise le moins, et cette pièce comporte un écueil : elle raconte une histoire dans l'histoire, et contraint les comédiens à jouer dans deux espaces-temps, voire avec deux personnages différents pour l'un d'eux. J'ai beau chercher, je peine à concevoir une "bascule lumière" à la fois nuancée et "pédagogique" pour le spectateur. Quant à la musique, elle est primordiale. Lorsque "Tout ce que vous voulez" a été joué à Paris, la critique majeure adressée à ce spectacle consistait dans ses "noirs" multiples, qui cassaient le rythme et sapaient l'attention du public. Je veux trouver un moyen de renverser la vapeur. Une idée commence à poindre... mais à mes yeux, une pièce de théâtre est une oeuvre collective, alors j'attendrai d'en discuter avec les comédiens et le régisseur avant de prendre une décision.
Le travail préparatoire est achevé... prochaine étape : la mise en vie.